05 janvier 2019
Pendant longtemps, la crainte de nombreux justiciables était "d'avoir un casier". Dans l'imaginaire collectif, le casier était cette fiche infamante pouvant barrer l'accès à l'emploi, consultable par on ne sait trop qui. Encore aujourd'hui de nombreux clients, et parents de clients mineurs, impliqués dans des affaires pénales restent focalisés sur l'inscription d'une mention au casier judiciaire...à tort! Depuis 1994 et la création du STIC, ancêtre du TAJ, le casier judiciaire, et plus particulièrement le bulletin n°2, n'est plus le fichier de référence pour évaluer les antécédents judiciaires et la moralité d'une personne. Le casier judiciaire recense en effet essentiellement les condamnations pénales et certaines mesures alternatives, déchéances et incapacités, inscrites après une décision judiciaire. Le TAJ recense en revanche non seulement les condamnations, mais également les simples mises en cause ayant donné lieu à une audition de police, une garde à vue voire un rappel à la loi, autant d'informations qui ne figurent pas au bulletin n°2 du casier judiciaire. Le TAJ comportant des informations bien plus complètes, c'est ce fichier qui est utilisé pour la réalisation des enquêtes de moralité préalables au recrutement à certains postes sensibles (sécurité, police gendarmerie, etc.). De plus, alors que la durée de conservation des données au bulletin n°2 du casier judiciaire est comprise entre 3 et 5 ans, la majeure partie des mentions figurant au TAJ est conservée pendant 20 ans (voire 40 ans pour les infractions les plus graves) et cela même en l'absence de condamnation. Une garde à vue pour consommation de cannabis à 19 ans donnant lieu à un simple rappel à la loi pourra donc bloquer l'accès à un emploi réglementé passé 30 ans. La durée de conservation des données est justifiée par les promoteurs du TAJ par la nécessité d'aider les enquêteurs chargés d'une enquête judiciaire à mieux cerner la personnalité d'un individu suspecté ou mis en cause. Si on peut s'interroger sur la pertinence de conserver trace d'un rappel à la loi jusqu'à 20 ans après sa survenance, on observe que l'essentiel des difficultés liées au TAJ est lié à l'utilisation du fichier dans le cadre d'enquêtes administratives. Le refus d'embauche ou de délivrance d'un agrément suite à une mise en cause ayant abouti à un classement sans suite apparaît probablement comme la conséquence la plus choquante, et malheureusement la plus commune. Il en va de même des décisions de rejet prises sur le fondement de rappels à la loi qui sont des décisions d'avertissement du procureur de la République, non susceptibles de contestation, mais qui apparaissent souvent, à tort, aux yeux des fonctionnaires comme équivalentes à des déclarations de culpabilité. Le plus regrettable est que les personnes découvrent bien souvent l'existence du TAJ lors du retour négatif de leur enquête administrative. À ce stade, ces dernières ont parfois passé un examen ou entamé une formation payante dans le but d'occuper un emploi réglementé pour se voir finalement refusé dans la dernière phase du processus de recrutement pour cause d'inscription au TAJ. C'est pourquoi il est essentiel que l'existence du TAJ soit connue aussi largement que possible par les citoyens, afin de leur permettre de faire valoir leurs droits face à un fichier pouvant avoir des implications concrètes, et parfois très lourdes sur leur vie privée.
0 Commentaires
Votre commentaire sera affiché après son approbation.
Laisser un réponse. |
ARCHIVES :
Consultation du TAJ et violation du secret professionnel Renforcement des enquêtes administratives des salariés et sous-traitants travaillant dans le secteur nucléaire Quel délai pour l'examen d'une requête en effacement du TAJ ? Consultation du TAJ et violation du secret professionnel. Pourquoi le TAJ est devenu le nouveau casier judiciaire. |