Août 2019
Le fichier TAJ, relativement inconnu du grand public, gagne en notoriété à mesure que la presse s'y intéresse. Dans un article 13 août 2019, le journal La Croix rappelle que 18,9 millions de Français sont fichés dans le TAJ, que ce soit en qualité de victime ou de mis en cause. Plus d'un quart de la population apparaît ainsi dans ce fichier, ce qui en fait l'un des plus riches en données personnelles sensibles. Comme le rappelle l'article, plusieurs pistes sont régulièrement évoquées pour rendre le TAJ plus respectueux des libertés fondamentales. L'une de ces mesures, qui paraît pourtant évidente, serait que les personnes inscrites dans le TAJ soient informées au moment de leur inscription dans le fichier, ainsi que des droits dont elles disposent face à cet enregistrement. Cette information élémentaire permettrait d'éviter que les personnes inscrites découvrent leur existence dans le TAJ tardivement, par exemple au moment de postuler à certains emplois soumis à des vérifications d'antécédents judiciaires pouvant déboucher sur des refus d'embauche ou d'agrément. En effet, même en cas d'absence de poursuites, ou lorsqu'une enquête est classée sans suite, les données des personnes mises en cause restent enregistrées dans le TAJ pour une durée de 5, 10, 20 ou 40 ans selon la nature des faits. En parallèle, les possibilités d'accès au TAJ par des administrations ont considérablement augmenté, posant d'importantes questions en matière de droit à l'oubli. EN SAVOIR PLUS SUR LE TAJ
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Juillet 2019
Nous signalions en février dernier la condamnation d'un gendarme par le tribunal correctionnel de Cambrai pour la consultation frauduleuse du fichier TAJ du nouvel ami de son ex compagne. Un dossier similaire était jugé par le tribunal correctionnel de Nantes le 4 juillet 2019 dernier. Dans cette nouvelle affaire, un gendarme volontaire avait consulté le TAJ d'un rival amoureux et avait ensuite révélé à son ex compagne que son nouveau compagnon avait été condamné et incarcéré par le passé. Jugé pour violation du secret professionnel et divulgation illégale volontaire de données à caractère personnel, le gendarme a finalement été condamné à 2 000€ d'amende avec sursis. Cette affaire permet de rappeler que si la consultation du TAJ est extrêmement aisée pour les policiers et les gendarmes, l'utilisation de ses données à des fins personnelles est interdite et peut être sanctionnée pénalement. De surcroît, les consultations du fichier TAJ donnent lieu à l'enregistrement du nom des personnes qui y accèdent à des fins de contrôle de l'utilisation du fichier. Il est donc possible pour toute personne suspectant le détournement de ses données de déposer plainte afin de provoquer l'ouverture d'une enquête sur les conditions d'accès aux informations la concernant dans le fichier TAJ. 25 mai 2019
Tous les salariés amenés à travailler dans une centrale nucléaire font l'objet d'une enquête administrative préalable à leur embauche ou à la délivrance d'une autorisation d'accès à une installation nucléaire. Depuis 2017, cette enquête est réalisée par les gendarmes du Commandement spécialisé pour la sécurité nucléaire (Cossen), Jusqu'à présent, si le salarié pouvait encore faire l'objet par la suite d'enquêtes administratives périodiques aléatoires, une inscription dans le TAJ postérieure à l'embauche ne représentait généralement pas une difficulté pour la conservation d'un emploi. Les choses vont cependant prochainement évoluer puisque le rythme des enquêtes administratives concernant tous les salariés du secteur nucléaire (sous-traitants compris) va considérablement augmenter pour devenir annuel, ainsi que le rapporte un article du journal La Presse de la Manche. Si une inscription dans le TAJ représentait souvent un obstacle à l'embauche, elle pourrait dans le futur remettre également en cause la conservation d'un emploi. Cette évolution pose à nouveau la question des données inscrites dans le TAJ et de l'utilisation qui en est faite. Le TAJ recense en effet l'intégralité des antécédents judiciaires d'une personne, y compris lorsque les faits ont été classés sans suite ou ont fait l'objet d'un simple rappel à la loi (qui n'est pas contestable puisqu'il ne constitue pas officiellement une sanction). En outre, la trace des faits ayant donné lieu à des condamnations est conservée dans le TAJ pour une durée très supérieure à celle du casier judiciaire, de sorte que des condamnations ne figurant plus au casier judiciaire depuis longtemps peuvent tout de même être prises en compte dans le cadre d'enquêtes administratives. Pour mémoire, la majorité des mentions du bulletin n°2 du casier judiciaire (qui est consulté dans le cadre des enquêtes administratives) est effacée à l'issue d'une durée comprise entre 5 et 10 ans, contre une durée de conservation comprise entre 20 et 40 ans pour le TAJ. De plus, alors que la loi prévoit la possibilité de se faire dispenser par le tribunal de l'inscription d'une condamnation au bulletin n°2 du casier judiciaire, il n'existe aucun dispositif permettant d'éviter a priori une inscription au TAJ. Seule une procédure longue et complexe d'effacement est prévue, ne pouvant être mise en oeuvre que postérieurement à l'inscription. C'est pourquoi, il est souhaitable de clarifier les critères sur la base desquels sont rendus les avis à la suite des enquêtes administratives, de manière à remédier au sentiment d'arbitraire et d'opacité qui entoure aujourd'hui ce type d'enquête. EN SAVOIR PLUS SUR LE TAJ 15 mai 2019
Le TAJ reste un fichier relativement peu connu du public. De ce fait, de nombreuses personnes découvrent son existence à l’occasion d’une enquête administrative défavorable préalable à une embauche dans la fonction publique (par exemple en police ou gendarmerie), un refus d’agrément par le CNAPS, un refus de badge d’accès à un site à circulation restreinte, un refus de naturalisation, etc. Dans ces cas précis, les conséquences d’une inscription au TAJ étant très importantes, nos clients nous contactent fréquemment dans l’urgence afin d’obtenir au plus vite leur effacement du fichier ou, a minima, le blocage des informations les concernant. Si la loi prévoit que le procureur de la République saisi d’une requête en effacement du TAJ dispose d’un délai de deux mois pour prendre une décision, ce délai est en pratique presque toujours dépassé. On observe ainsi, selon les tribunaux, un délai compris entre un mois pour les plus rapides et plus de six mois pour les plus engorgés. Le magistrat référent, compétent au niveau national, répond pour sa part rarement avant plusieurs mois aux requêtes qui lui sont soumises. Hormis quelques rares cas de blocage observés dans un nombre limité de tribunaux (absence de réponse au-delà de six mois) le délai moyen d’examen, toutes juridictions confondues, est d’environ quatre mois à compter de la réception de la requête. En pratique, il est donc nécessaire de s’armer de patience et d’envisager la mise en œuvre simultanée d’autres moyens pour limiter les effets négatifs d’un maintien temporaire au TAJ. Il est ainsi possible, sans attendre la décision du procureur de la République sur l'effacement du TAJ, de contester par la voie d’un recours gracieux un refus d’agrément préfectoral pour les policiers municipaux. Il en est de même concernant les décisions de refus d’agrément par le CNAPS ou de refus de délivrance d’un badge aéroportuaire. À chaque fois que cela sera possible, et pour éviter toute difficulté, il sera toutefois conseillé d’introduire la requête en effacement du TAJ six mois au moins avant de postuler ou de solliciter un agrément soumis à une enquête administrative préalable. Lorsque le refus a déjà été formulé par l’autorité compétente, notre cabinet peut intervenir en urgence pour le dépôt d'une requête et la préparation simultanée d’un recours gracieux. 10 février 2019
En raison de l'étendue des informations personnelles qu'il comprend, le TAJ est un fichier extrêmement sensible dont la consultation est réservée aux personnes habilitées pour un usage déterminé. Le TAJ est ainsi presque systématiquement employé dans les enquêtes judiciaires ou administratives. Toute consultation du fichier hormis les cas autorisés peut constituer le délit de détournement de données à caractère personnel tandis que la révélation des informations qu'il contient à un tiers peut constituer le délit de violation du secret professionnel. Ces deux délits sont punis de lourdes peines d'emprisonnement et d'amende. En application de l’article R. 40-30 du code de procédure pénale, lorsqu’un agent procède à une consultation du TAJ, tant dans un cadre judiciaire qu’administratif, son identifiant, la date, l’heure et la nature de la consultation font l’objet d’un enregistrement, qui est conservé durant six ans. Ce dispositif permet d'assurer la traçabilité des consultations du fichier. Périodiquement, la presse fait état de condamnations pour violation du secret professionnel. En février 2019, un gendarme a ainsi été condamné par le tribunal correctionnel de Cambrai pour avoir consulté la fiche TAJ du nouveau compagnon de son ancienne épouse et avoir alerté celle-ci sur ses antécédents judiciaires. L'article est consultable sur ce site. En janvier 2019, un autre gendarme a été condamné par le tribunal correctionnel d'Amiens pour avoir détourné les informations mentionnées dans le TAJ à des fins personnelles en y recherchant les antécédents de femmes qu'il fréquentait. L'article est consultable sur ce site. 05 janvier 2019
Pendant longtemps, la crainte de nombreux justiciables était "d'avoir un casier". Dans l'imaginaire collectif, le casier était cette fiche infamante pouvant barrer l'accès à l'emploi, consultable par on ne sait trop qui. Encore aujourd'hui de nombreux clients, et parents de clients mineurs, impliqués dans des affaires pénales restent focalisés sur l'inscription d'une mention au casier judiciaire...à tort! Depuis 1994 et la création du STIC, ancêtre du TAJ, le casier judiciaire, et plus particulièrement le bulletin n°2, n'est plus le fichier de référence pour évaluer les antécédents judiciaires et la moralité d'une personne. Le casier judiciaire recense en effet essentiellement les condamnations pénales et certaines mesures alternatives, déchéances et incapacités, inscrites après une décision judiciaire. Le TAJ recense en revanche non seulement les condamnations, mais également les simples mises en cause ayant donné lieu à une audition de police, une garde à vue voire un rappel à la loi, autant d'informations qui ne figurent pas au bulletin n°2 du casier judiciaire. Le TAJ comportant des informations bien plus complètes, c'est ce fichier qui est utilisé pour la réalisation des enquêtes de moralité préalables au recrutement à certains postes sensibles (sécurité, police gendarmerie, etc.). De plus, alors que la durée de conservation des données au bulletin n°2 du casier judiciaire est comprise entre 3 et 5 ans, la majeure partie des mentions figurant au TAJ est conservée pendant 20 ans (voire 40 ans pour les infractions les plus graves) et cela même en l'absence de condamnation. Une garde à vue pour consommation de cannabis à 19 ans donnant lieu à un simple rappel à la loi pourra donc bloquer l'accès à un emploi réglementé passé 30 ans. La durée de conservation des données est justifiée par les promoteurs du TAJ par la nécessité d'aider les enquêteurs chargés d'une enquête judiciaire à mieux cerner la personnalité d'un individu suspecté ou mis en cause. Si on peut s'interroger sur la pertinence de conserver trace d'un rappel à la loi jusqu'à 20 ans après sa survenance, on observe que l'essentiel des difficultés liées au TAJ est lié à l'utilisation du fichier dans le cadre d'enquêtes administratives. Le refus d'embauche ou de délivrance d'un agrément suite à une mise en cause ayant abouti à un classement sans suite apparaît probablement comme la conséquence la plus choquante, et malheureusement la plus commune. Il en va de même des décisions de rejet prises sur le fondement de rappels à la loi qui sont des décisions d'avertissement du procureur de la République, non susceptibles de contestation, mais qui apparaissent souvent, à tort, aux yeux des fonctionnaires comme équivalentes à des déclarations de culpabilité. Le plus regrettable est que les personnes découvrent bien souvent l'existence du TAJ lors du retour négatif de leur enquête administrative. À ce stade, ces dernières ont parfois passé un examen ou entamé une formation payante dans le but d'occuper un emploi réglementé pour se voir finalement refusé dans la dernière phase du processus de recrutement pour cause d'inscription au TAJ. C'est pourquoi il est essentiel que l'existence du TAJ soit connue aussi largement que possible par les citoyens, afin de leur permettre de faire valoir leurs droits face à un fichier pouvant avoir des implications concrètes, et parfois très lourdes sur leur vie privée. |
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